Bien se nourrir en Haïti, un choix crucial
Face à la situation sociale et économique du pays qui se dégrade, beaucoup de familles peinent à assurer les trois repas quotidiens en Haïti. Ainsi, pour avoir de quoi mettre sous les dents le soir, de nombreuses personnes se contentent d’acheter d’un plat de spaghettis, un barbecue ou des frites accompagnées du jus blindés.
Malgré que la situation sécuritaire reste inchangée dans certaines zones de la capitale, la nuit reste pourtant agitée dans quelques endroits de Port-au-Prince. Aux champs de mars, en plein cœur d’une ville noir et sale, des espaces sont aménagés au bord de la rue proposant un menu varié: Spaghetti, poulets importés, frites, barbecue, bière etc. C’est vers ces lieux que certaines personnes se ruent, après le crépuscule, à la quête de nourriture. À Port – au- Prince, des vendeurs de spaghettis et de jus blindés sont légion. Philippe (Un prêt nom) un jeune homme orphelin, les fréquente depuis longtemps. Sa situation familiale l’oblige à manger dans la rue. «Avant la mort de mes parents, nous mangions correctement en famille. Mais depuis qu’ils sont partis pour l’orient éternel, 12 janvier 2010, la famille a presque volé en éclats. Nos ainés nous assurent uniquement le repas de midi. Le soir, tout le monde se débrouille. C’est difficile en tous cas», lance Philippe, attendant sa commande de pain à œufs.
Tout près de Philippe se trouve Carine, mère de cinq enfants. Elle est venue acheter deux plats spaghettis pour ses enfants. «Ce qui est plus important chez moi, c’est le repas. La nuit, chacun se démène. Chaque soir, j’achète du spaghetti, du pain à œufs ou des frites. Maintenant tout est cher au marché», rappelle aussi Carine qui avoue que son mari est un chômeur.
S’alimenter au bord de la rue est devenue chose courante dans plusieurs quartiers de Port –au-Prince. Ce jeune homme qui requiert l’anonymat a commandé un plat chaud, du Riz et légumes chez madame Harold près du Collège St Pierre. Etudiant en sociologie à la Faculté d’Ethnologie de L’UEH, conscient du manque d’hygiène, n’a pas le choix que de manger dans la rue, dit-il.
Bien se nourrir pour une santé saine
La mal-bouffe est aujourd’hui accusée de tous les maux comme l’ Obésité, insuffisance cardiaque, hypertension, diabète et même cancer, a fait savoir le nutritionniste Auguste Joseph. Difficile pour l’état de santé des haïtiens d’échapper à la peine de mort d’une hypertension, d’un diabète, d’une hypercholestérolémie, regrette le docteur. Dans un contexte économique de plus en plus difficile, rares sont les familles qui peuvent s’offrir le luxe d’un repas copieux avec des protéines animales, ajoute le specialiste. Tout en estimant que la population haïtienne doit intégralement pouvoir jouir de tous ses droits, le nutritionniste suggère aux autorités compétentes de penser à relancer l’agriculture et à améliorer la qualité des produits dans une démarche de santé publique et de respect des standards internationaux, tout en en faisant la promotion comme un élément identitaire et de souveraineté « consommer local ».
Depuis plusieurs décennies les trois repas habituels ne sont plus au rendez-vous dans la majorité des familles haïtiennes. Le ventre haïtien est un carrefour alimentaire. Suffisant pour affirmer sans complaisance mais avec exactitude que nous mangeons n’importe comment, nous mangeons tout, nous consommons des aliments provenant des quatre points du globe et dont la composition est souvent inconnue.
Un véritable métissage gastronomique et un mélange parfois toxique avec lequel notre appareil digestif s’est marié pour le meilleur et pour le pire.