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Haïti, pays où des présumés criminels sont plus libres que tout le monde

2019, année de «pays lock». Le comédien Matyas s’est illico converti en activiste politique. Mais cela a un prix. Le 12 janvier dernier, il a posé une action qui lui vaut un mandat d’amener. Alors que, d’autres personnes accusées de crimes en Haïti continuent de circuler librement, comme si de rien n’était. Les noms d’officiels cités dans le massacre de La Saline, dans les détournements de fonds destinés à la reconstruction du pays, dans des cas de kidnapping, la justice ferme ses yeux. Des gerbes de fleurs jetées par terre lors d’une cérémonie officielle, la justice se réveille et émet des mandats.

Jimmy Chérisier alias «Barbecue» est un ancien policier. Il est accusé d’être auteur ou à l’origine de plusieurs cas d’assassinat. Ses victimes sont recensées notamment à Delmas 2, 4, 6, Tokyo, Saint Martin et à Bel-Air. Il continue de circuler librement. En plus, des photos d’un homme muni de plusieurs armes de grands calibres, faisant croire que c’est Barbecue, circulent sur les réseaux sociaux. Il n’a non plus jamais nié qu’il possède des armes automatiques.

Aussi, Joseph Pierre Richard Duplan et Fednel Monchéry, respectivement ex-délégué départemental de l’Ouest et ex-directeur général du ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales, sont indexés dans l’affaire du massacre de La Saline. Plus de 70 personnes avaient été lâchement assassinées. Plus d’un an après, ils sont, ni Barbecue, ni M. Duplan, encore moins M. Monchéry, tous les trois libres comme le vent et n’ont jamais fait l’objet de mandat d’amener. Pourtant, l’acte commis par Matyas le dimanche 12 janvier dernier à St-Christophe, inélégant certes, mais qui ne représente aucun danger ou menace pour le pays, lui coûte un mandat d’amener. Ce qui lui contraint de circuler comme bon lui semble.

Le mandat émis contre Matyas fait couler les salives. Certains croient qu’il ne devait pas souiller l’âme des victimes du 12 janvier 2010 alors que pour d’autres, c’est un coup du pouvoir en place qui lui persécute pour ses positions politiques.

La deuxième hypothèse paraît plausible puisque, après avoir été suspecté dans le massacre de La Saline, l’administration de Jovenel Moïse a mis du temps avant d’écarter Pierre Richard Duplan et Fednel Monchéry du pouvoir. Ensuite, après avoir été démis de leur fonction, la justice haïtienne n’a, jusqu’à présent, intenté aucune action contre eux. Et d’après les ouï-dire, Barbecue serait un bras qui agit pour le compte du palais national. Ce qui semble être le cas puisque, malgré toutes les accusations, la justice haïtienne peine encore à agir sur le dossier.

Qu’ils soient coupables ou innocents, la justice devait agir soit pour les condamner ou pour les disculper. N’ayant rien fait, on peut arriver à la conclusion qu’ils sont protégés par leur patron et sont, en ce sens, intouchables, au-dessus de la loi. Pourtant le comédien-militant Matyas mérite d’être poursuivi parce qu’il est un opposant au pouvoir.

En Haïti, la justice, décriée, est encore vilipendée. Une justice qui est déjà jugée où les juges ne sont pas indépendants. Ils sont en majorité des corrompus, pour répéter Jovenel Moïse lors de son passage en France. Donc, une justice aux plus offrants. Elle agit contre certains, et pour d’autres, elle n’existe pas. On se rappelle bien du dossier des 7 mercenaires, du militaire haïtiano-américain Duroseau qui avaient été arrêtés avec un arsenal d’armes de guerre. Ils ont déclaré être en mission pour le gouvernement haïtien et automatiquement, sont passibles de tout jugement. L’affaire du bateau de drogue sucrée d’Accra, de Woodly Ethéart (Sonson Lafamilia) et Renel Thelfort dit Le Récif. Des exemples vivants pour montrer que notre justice n’est pas du tout une femme aux yeux bandés comme elle devrait être. Ce qui est une mauvaise pratique et constitue un danger pour un pays laissant croire que règne l’Etat de droit.

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