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Détention en Haïti: entre arbitraire et légalité

Toute personne est détentrice du droit de circuler, de disposer de son corps, de se rendre librement d’un point à un autre moyennant une réunion des conditions établies par la loi ; c’est la Liberté individuelle.

Cette liberté est protégée généralement par un corpus de lois identifié sous le nom “habeas corpus”. Quand il s’agit de défendre son client arrêté illégalement, l’avocat du prévenu fait un recours en habeas corpus. Mais pour arriver à ce stade, faudrait déjà qu’il y ait mise en place pour un procès.

Le 28 Mars dernier, lors d’une entrevue donnée par l’inspecteur de police Gary Desrosiers relativement à la tentative d’évasion qu’il y a eu au pénitencier national en plein coeur de Port-au-Prince, l’homme des forces légales a déclaré qu’après un appel nominal vérifiant la présence de tous les prisonniers, les 3601 détenus ont répondu présent dont 392 condamnés soit 10,88 %. S’il n’y a que 392 condamnés, que font les autres en détention? Serait-ce parcequ’ils attendent la signature de l’ordre de libération?

Le média qui a relaté cette information a pris le soin de préciser, et nous le savons tous, que la plupart de ces prisonniers n’ont jamais été présentés par devant un juge pour statuer soit sur la légalité de leur arrestation, soit sur le fait qui leur est incriminé.

Peut-être l’ont-il été et que le juge n’ait pas rendu sa décision? Il serait accusé de déni de justice. Et certains (les détenus) témoignent même sur les ondes des stations de radio de la capitale n’avoir jamais été devant un juge.

L’habeas corpus dont nous avons fait mention plus haut est constitutionnellement consacré en Haïti dans les articles 24 et suivants de la Constitution de 1987 version amendée en sa section B. L’article 26 de ladite Constitution dispose:

“Nul ne peut être maintenu en détention s’il n’a comparu dans les quarante huit (48) heures qui suivent son arrestation par devant un juge appelé à statuer sur la légalité de l’arrestation et si ce juge n’a confirmé la détention par décision motivée”

Cette disposition nous porte à penser logiquement que ceux parmi les 89.2% des détenus du plus grand centre carcéral haïtien qui ont plus de 48 heures d’incarcération sont constitutionnellement libres. Pourquoi sont-ils encore à l’intérieur? Est-ce par pur mépris de la loi? De la Constitution?

Le code pénal haïtien de son côté en son article 289 prévoit une peine d’emprisonnement d’un an à cinq ans pour ceux qui auraient arrêté des prévenus hors des cas ordonné par la loi, en d’autres termes, sans flagrant délit ni mandat entre six heures du soir et six heures du matin, ce qui se fait à répétition dans les zones dites de non-droit.

Par ailleurs, l’article 27 de ladite Constitution confère aux personnes ayant subi ou subissant ses actes arbitraires la qualité de poursuivre leurs auteurs par devant les tribunaux compétents et ce, peu importe le corps auquel ils appartiennent.

Cependant, si les juges n’ont pas été là pour écouter les victimes lors de leurs illégales détentions et d’en ordonner leur libération comme le suggère l’article 26.2 de la constitution de 1987 op.cit, l’on est en droit de se demander, pourquoi les écouteraient-ils lors de leur requête de réparation?

À quand la bonne justice? À quand la police qui sera nationale?

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