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Face aux crises internes du pays, les écoliers et universitaires sont les premières victimes

En moyenne, l’année académique (scolaire) est assise sur une durée de 189 jours de classe, soit 9 mois d’école, incluant notamment les jours de congés. Pourtant, les faiseaux de crises face auxquelles Haïti succombe consécutivement durant la gouvernance de l’équipe jovenelienne, plus d’un restent sceptiques que les écoliers ainsi que les étudiants de l’année académique 2019-2020 pourront accéder au niveau supérieur l’année prochaine.

Jovenel MOÏSE a pris les rênes de la plus haute instance administrative du pays en 2017. L’année suivante, son équipe allait faire face à son tout premier test, les 6, 7 et 8 juillet, suite à la décision officielle d’augmenter les prix de l’essence sur tout le territoire national . Ce fut un chaos total. Le pays était entièrement bloqué par des barricades. C’est le premier épisode de pays lock. Du coup, toutes les activités étaient paralysées. Les écoles et universités n’en étaient pas épargnées. Par conséquent, les élèves et étudiants étaient automatiquement contraints de rester chez eux pendant plusieurs semaines pour question de sécurité.

En 2019, une nouvelle vague de pays lock refait surface. Toutes les zones étaient complètement barricadées. Le pouvoir du président Jovenel a été lourdement contesté où il
se mettait à couvert pendant plusieurs semaines. Les petrochallengers, les principaux initiateurs de ce mouvement, avaient commencé leur bataille avec la revendication de demander à la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) de donner son rapport sur la gestion du fonds Petrocaribé et laisser à la justice haitienne de faire le suivi “mare vòlè fon petwokaribe yo”, ont-ils scandé.

Ce mouvement allait prendre chair quand les opposants politiques au pouvoir en place ont profité de l’occasion pour demander un changement radical du système. Par la suite, d’autres secteurs du pays, les artistes, prêtres et fidèles religieux, les motards… allaient y adhérer. Du coup, le pays a passé 3 mois consécutifs prisonnier des mouvements de pays lock. Pour une deuxième fois, les portes des écoles et universités étaient fermées.

Ainsi, des associations évoluant dans le domaine de droit de l’enfant, droit de l’homme et le secteur éducatif demandaient par voie publiques aux contestataires de laisser les enfants jouir leur droit à l’éducation, notamment en leur laissant librement aller à l’école. Les activistes politiques ne leur avaient pas écouté, croyant que si les écoles ouvrent, Jovenel n’aura plus aucune raison de démissionner. On se rappelle de cette anecdote : “Jovenel ale jodi, lekòl louvri demen”.

Le Ministre de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle, Pierre Josué Agénor Cadet, par tentative de remédier à ce problème, a présenté en décembre dernier un calendrier scolaire réaménagé pour l’année académique 2019-2020 où on passe de 189 à 147 jours de classe pour combler le programme scolaire avec un programme de compétences minimales.

L’année 2019, l’une des pires années que le pays ait connue sur le plan politique, est heureusement écoulée. Les Haïtiens avaient misé sur l’année 2020 qu’ils croyaient pouvoir être meilleur . Elle aussi n’a pas bien débuté . C’est l’ère où le Kidnapping gagne du terrain un peu partout sur le territoire national. Toutes les institutions étaient sensées ouvertes mais les employés avaient peur d’y aller. S’agissant des écoliers, leurs parents ne leur avaient pas laissé aller à l’école par souci qu’ils se font enlever. Pour une troisième fois, les écoles et universités avaient pris un gros coup.

Le 19 mars 2020, dans une conférence de presse, il a été annoncé que le pays est désormais affecté par le Coronavirus et que par mesure de précaution, afin de limiter la propagation massive du COVID-19, les portes des institutions du pays sont fermées et que toute réunion d’au moins de dix personnes est formellement interdite. Les institutions scolaires et universitaires en étaient les premières cibles. Pour une quatrième fois, les école et universités étaient fermées.

Ainsi, pour cette année académique (2019-2020) les élèves, étudiants ainsi que leurs parents, les professeurs, les directeurs d’école, la société civile et l’État se trouvent tous aujourd’hui face à un dilemme commun : redoublement ou accès au niveau supérieur pour cette année académique ? Dans ce climat d’insecurité sanitaire, le système éducatif haïtien qui était lui même consécutivement en crise vient de s’empirer. D’ailleurs, les apprenants n’avaient déjà pas accès à une infrastructure adéquate, un environnement sain et un enseignement de qualité, pour certaines écoles bien entendu. Mais aujourd’hui, c’est du jamais vu.

À la fin de cette année, si la situation s’améliore, on peut attendre que le MENFP donne une évaluation moderée afin que les élèves aient facilement accès au niveau académique supérieur. Mais ce serait une mauvaise décision, car les apprenants n’ont sans doute pas acquis la quantité de bagage académiques requis pour pouvoir accéder au niveau supérieur. Si j’ose citer l’ancien ministre Manigat, la décision la plus réaliste serait de réaménager les corricula scolaires, lesquels modifieront les compétences que les apprenant auront à acquérir durant les trois années scolaires suivantes, avec bien sur l’exception des classes ayant des examens officiels qui méritent une considération particulière.

“Pas de redoublement pour l’année scolaire 2019-2020″ et déjà mieux préparer les prochaines années scolaires de manière crédible.
Dans ce climat particulier et traumatisant tant pour les directeurs d’écoles, les enseignants et les parents, le pari de sauver l’année scolaire, parait titanesque, compte tenu des trois premiers mois perdus, du faible niveau de préparation générale et de la qualité des infrastructures. Ne nous précipitons pas de bâcler une année scolaire et de terminer par des évaluations pour des apprentissages qui n’ont pas eu lieu pour la grande majorité des apprenants. Ce serait une double peine pour un système scolaire déjà inéquitable, tant pour les parents que pour les élèves.

La solution la plus réaliste serait déjà de considérer un réaménagement curriculaire, avec une nouvelle ingénierie des programmes et cours pour que les compétences qui devaient être acquises en trois ans d’études le soient sur les deux prochaines années, exception faites des classes d’examens officiels qui méritent un traitement particulier, a suggéré l’ancien ministre de l’éducation nationale Nesmy Manigat.

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