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La Mégalomanie, le Tourment Chronique du Paysage Politique Haïtien !

« Le mégalomane est l’individu qui a beaucoup de carences, souffrent d’un sentiment d’infériorité inattendu et d’un grand vide social »

En observant les événements politiques depuis plus de 4 décennies, je réalise qu’il y a une constante qui demeure fidèle dans toutes les manifestations de l’homme politique haïtien, la mégalomanie. Tant sur le plan personnel et institutionnel, le politicien reste l’esclave dévoué de la mégalomanie.

Pour un pays qui a plus de deux siècles de formation socio-historique, c’est incommodant d’observer la persistance de la féodalité dans les mœurs politiques haïtiennes. C’est un douloureux héritage qui s’installe pendant trop longtemps sur les épaules du peuple haïtien. Elle est si présente, qu’elle commence par épouser une forme identitaire a la nation.

Le comportement de l’homme politique dans une fausse vérité de la personnification de l’état est un problème majeur au changement. Le pouvoir personnel handicape les institutions et ralentit la créativité. Cette incapacité de disséquer le moi du collectif est la source de beaucoup de maux dont souffre la nation

Ce qui est curieux, c’est que nous vivons dans un monde globalisé. L’homme politique haïtien choisit délibérément de n’en pas tenir compte. Il agit comme si l’humanité est figée dans le temps. S’il est vrai que nos hommes politiques ne sont pas ignorants des principes normatifs de gestion d’une république, parce qu’ils étudiaient dans les plus grandes universités occidentales. En revanche, le politicien haïtien poursuit obstinément la campagne de la déification de sa personne. Au pouvoir, il régénère les pratiques administratives médiévales. Il n’arrive pas à se dissocier de l’héritage mégalomaniaque. Ainsi meurt une nation !
Selon le « Manuel Diagnostique », la « mégalomanie est une maladie psychologique incluse dans le trouble de la personnalité narcissique, en tant que symptomatologie ». Ceci explique le caractère egocentrique de l’état haïtien. Un état qui se définit comme l’ennemi numéro un du peuple. Ce dernier qui, en désespoir de cause affronte continuellement l’appareil étatique par des coup-d ’état, des manifestations violentes, des soulèvements populaires, des « révolutions », en résumé des troubles en permanence. Ce qui crée l’instabilité chronique, une réalité qui est en totale contradiction a toute démarche de développement économique et de progrès social.

Toute l’arène politique haïtienne reflète l’expression mégalomaniaque. D’abord, les institutions politiques. Que ce soient les organisations sociales, politiques, parfois même professionnelles, évoluent dans cette ambiance délétère qui les empêche de grandir, d’atteindre la maturité et rester le plus longuement possible à ce rang.

Tous les partis qui animent le paysage politique sont dirigés par des chefs a vie. Ils ne pratiquent pas les principes démocratiques dans le fonctionnement de l’organisation politique. Les dirigeants sont foncièrement intolérants. Ils n’acceptent pas les divergences d’idées. Le principe selon lequel, « L’effectif leaders est celui qui se développe tout en aidant les autres à se développer », ne fait aucun sens pour eux. Il y a un climat de méfiance systématique qui s’installe, ce qui réduit profusément le développement de l’institution politique. Très souvent, les organisations sont morcelées de l’intérieur, au sein même de la direction politique. C’est déjà l’installation d’une ambiance clientéliste conduisant ainsi toute discussion structurelle ou conjoncturelle a la perversion. Les arguments politiques solides n’ont aucune chance de s’imposer, sauf s’ils proviennent du camp du leaders incontestable et incontesté.

On peut se référer à quelques cas typiques pour illustrer les points énoncés plus haut. Au cours de l’année 2014, Moise Jean Charles fut expulsé de l’organisation politique « Fanmi Lavalas ». Il fit le tour des media en Haïti comme à l’étranger pour dénoncer le comportement anti démocratique des dirigeants, en fustigeant personnellement l’ancien président Jean Bertrand Aristide comme un géronte. Ce dernier est le coordonnateur a vie de l’organisation, une réalité que Moise avait sévèrement critiquée comme dictatoriale.

En décembre 2014, Moise Jean Charles, accompagné d’un groupe de dirigeants, dont Assad Volcy, fonda la « Plateforme Pitit Dessalines ». A ce moment, Il vulgarisait son intention de construire une organisation moderne, différente de ceux-là qui existaient déjà, c’est-à-dire qui pratique la tolérance, la divergence d’idées, les principes démocratiques et d’organisation, l’alternance…Moins d’un an après, les désaccord politiques devenus ingérables. Il expulsa presque tous ceux-là qui participaient à la création de l’organisation avec lui. Aujourd’hui, Jean Charles Moise dirige l’organisation tout seul sans une effective direction nationale, et ceci depuis 6 ans. Pas même un congrès a été organisé pour renouveler ou maintenir la direction du parti, entretemps qui se transforme en deux abstractions politiques à l’intérieur d’une même structure, « Platfom Pitit Dessalines » et « Parti Pitit Dessalines » !

Moise Jean Charles fait partie du lot des oligarques politiques du pays, doublé d’un populisme primaire qui pollue l’arène politique !
On peur souligner beaucoup d’autres cas ou le dirigeant est à la tête de l’organisation politique depuis plus environ 20 ans. Entre autres : « Konvansyon Inite Demokratik » avec Evans Paul a la tête, « Alliance Pour la libération et l’Avancement d’Haïti-ALLAH » que dirige Reynold Georges, « GREH-Grand Rassemblement pour l’Evolution d’Haïti » avec Himmler Rebu comme chef…on peut citer des dizaines de cas similaires. Toutefois, il faut noter des efforts de la part de « OPL, Organisation du Peuple en Lutte », la « Fusion des Sociaux-démocrates » !

Les conséquences de l’anarchie régnante dans le paysage politique haïtien sont inévitables. Des partis politiques qui existent depuis plusieurs décennies, mais ne jouissent d’aucune représentativité nationale. Le peuple, moteur de toute organisation politique, reste à l’écart. Il ne participe pas. Les jeunes, eux aussi, restent insensibles aux appels des leaders politiques. Ces derniers, être témoins de l’absence de sérieux des responsables mégalomanes, ils restent à distance. Pas d’avenir pour les militants, aucune chance pour eux d’accéder a des postes de direction, voir diriger le parti.

Ce qui est incompréhensible. Déjà très tôt au milieu du 19e siècle, Haïti s’était déjà dotée d’institutions politiques viables. Les plus connus sont le « Parti Liberal » et le « Parti National ». A l’époque, même l’Europe tâtonnait encore de se doter d’instruments politiques forts. Comment se fait-il que les partis politiques soient si mal organisés ?

La réponse a cette question est déjà détaillée plus haut. Cependant, il y a lieu de mentionner que le 21e siècle n’a pas été tendre aux partis politiques qui s’enferment dans la tradition d’hier. Aujourd’hui, il s’agit d’un phénomène mondial auquel aucun pays n’échappe. L’Europe, l’Amérique, l’Asie et l’Afrique font la même expérience. Des partis « déconnectées de la réalité », des dirigeants corrompus, des discours obsolètes et réguliers. Dirigeants et organisations n’arrivent pas à trouver des formules pouvant faire rêver les générations. C’est la répétition des élucubrations coutumières, d’ailleurs sans aucune conviction.

La situation est pire dans le tiers-monde, notamment Haïti. Les dirigeants politiques, en dépit d’être des mégalomanes, ne sont porteurs d’aucun espoir. Ne véhiculant pas de projets attractifs, personne ne les prend au sérieux. La routine électorale et événementielle semble les atteindre eux-mêmes jusqu’à en devenir des périodiques. Donc, il n’y a plus de cause !
Que peut-on attendre de ces mégalomanes qui prennent le paysage politique en otage. Certainement pas beaucoup de choses !
Des dirigeants politiques qui n’arrivent pas à pratiquer la démocratie au sein de leur propre organisation. Comment arriveront-ils à démocratiser une société encore mille fois plus complexe ?

S’ils n’arrivent pas à maintenir un climat unitaire a l’intérieur de leur institution politique, comment parviendront-ils à maintenir l’unité nationale ?

S’ils n’arrivent pas à doter leur organisation politique d’une administration saine, comment peut-on les confier l’initiative d’établir la gestion effective d’une nation si sophistiquée qu’Haïti ?

La persistance de ces questions importantes fragilise encore davantage le jeu politique dans le pays. Ce qui favorise l’émergence des individus apolitiques, issus de la société civile, a la plus haute fonction de l’état. Le peuple est toujours à la recherche d’un « outsider », a défaut d’un bilan positif des dirigeants politiques haïtiens. Eux, arrivés au pouvoir, renforcent le sous-développement, la dépendance, la misère…dans le pays. Les cas de Michel Martelly et de Jovenel Moise, deux apprentis dictateurs, sont les exemples cruels de l’échec d’Haïti.

Toutefois, il y a des cas exceptionnels d’une poignée d’hommes politiques qui ne succombent pas à la tentation de la mégalomanie. Cependant, ils sont si peu nombreux, de ce fait insignifiant.

La démarche de ce papier n’est pas d’affaiblir les dirigeants politiques. Au contraire, elle s’inscrit dans le cadre d’un processus de prise de conscience autour d’un problème qui fait beaucoup de mal au pays !

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