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Saisie d’armes et de munitions dans des ports en Haïti, et après ?

(TripFoumi Enfo) – La nouvelle de la saisie d’armes et de munitions dans des ports en Haïti a retenti ici et ailleurs comme une semonce. Bien sûr, la Police n’est pas à son premier coup de filet dans ce genre de dossier. Mais ce dernier est survenu dans un contexte où la population haïtienne subit amèrement les conséquences de la rentrée illégale d’armes et de munitions dans le pays par complicité ou négligence des responsables des douanes.

L’insécurité reste bien à la Une, des actes banditistes se répètent partout dans le pays et la confrontation entre gangs rivaux continue de semer la terreur dans les quartiers populaires. Après les interventions de la Police dans les douanes de Port-de-Paix et Port-au-Prince, une inquiétude reste planée sur le devenir de ces armes et munitions confisquées, n’arriveront-elles pas quand-même à destination ? Quelles mesures sont prises par les autorités policières pour les gérer ?

En effet, l’État haïtien à travers le gouvernement peut prendre bien des mesures pour gérer les produits illicites arrivant sur son territoire. Ce travail ne prétend pas prédire une mauvaise gestion des armes et munitions saisies dans le port de Port-de-Paix le 1er juillet dernier et dans la douane de Port-au-Prince ce 14 juillet. Il se veut, de préférence, d’attirer l’attention sur des choses susceptibles d’être arrivées dans ce dossier en formulant certaines interrogations.

Il n’est un secret pour personne qu’Haïti ne produit pas d’armes à feu. Cependant, cela n’empêche que de nombreux flingues illégaux circulent dans le pays. Étant donné les ports et aéroports sont les principales portes d’entrée d’un pays, le pullulement des armes illégales sur le territoire haïtien est dû à l’irresponsabilité de l’État en général et les autorités portuaires en particulier.

Le début du mois de juillet 2022 est marqué par la nouvelle de l’arrivée des conteneurs, ayant à bord des armes et des munitions, à la douane de Port-de-Paix en provenance de la Floride, États-Unis. Après une fouille, la Police, de concert à la justice, a procédé à des arrestations et la saisie de 120 000 cartouches réparties dans 157 caisses, trois armes de poing (deux pistolets 9 millimètres et un revolver de calibre 38 ), 30 chargeurs et 20 étuis de fusil Ak-47. Un montant de 3,890 dollars US et de 814,343 gourdes a été également saisi au port de Port-de-Paix, a informé la Direction de la Police du Nord-Ouest.

Par la suite, le 14 juillet 2022, des conteneurs suspectés à la douane de Port-au-Prince ont été fouillés par des agents douaniers, en présence du Commissaire du Gouvernement de la capitale, Jacques Lafontant. 18 armes automatiques dont 6 AK-47, des Galils et des M-4, un fusil de calibre 12, quatre à six armes de poing, près de 20 000 cartouches, 120 chargeurs d’armes de différents calibres, ont été confisqués. Cette cargaison d’armes et de minutions a été destinée à l’Église Épiscopale d’Haïti selon le Chef du Parquet de Port-au-Prince. Un véritable scandale !

L’importation illégale d’armes qui a putréfié la paix et la sécurité en Haïti est non seulement l’irresponsabilité des dirigeants haïtiens mais également la complicité des États-Unis, un pays qui contrôle bien son dispositif douanier mais qui n’avait pris aucune disposition pour stopper ce fléau. Comment un pays, confronté à un embargo d’armes depuis plusieurs décennies, est-il parvenu à une situaton d’insécurité aussi dégénérée ? Pour répéter Jacques Adler Jean-Pierre dans son éditorial sur l’insécurité qui sévit en Haïti “Leta, Leta, Leta, tè peyi Dayiti pa donnen zam, li pa donnen katouch, kote zam sa yo soti, kote katouch sa yo soti ?”.

Voilà ce même pays, les États-Unis d’Amérique, qui ne s’était pas préoccupé des armes qui laissaient son territoire vers Haïti, qui est maintenant l’instigateur d’une résolution avec le Mexique interdisant le transfert d’armes légères de petit calibre et de munitions à des acteurs non étatiques sur le sol haïtien. Cette résolution a été adoptée par le Conseil de sécurité de l’ONU, le vendredi 15 juillet après un vote à l’unanimité visant à lutter contre la guerre des gangs en Haïti.

Ce spectacle de cargaisons d’armes arrivées dans les ports en Haïti n’est pas nouveau. On se rappelle de la douane de Saint-Marc qui était un passage par excellence d’armes à feu. Les informations concernant le devenir des armes confisquées ne sont pas publiques. Ne s’étaient-elles pas dispersées dans la nature ?
Ne sont-elles pas, en grande partie, à la base de l’insécurité que nous subissons tous aujourd’hui ?

Rappelons-nous de la grosse saisie d’armes et de munitions le 8 septembre 2016 à la douane de Saint-Marc avant les élections. Le procès-verbal de constat faisait état d’une saisie entre autres de : 150 fusils de calibre 12, 9 fusils de calibre 12 double canon, 5 fusils M 4,15 paires de menottes, 10 paires de bottes, 50 caisses de 50 unités de cartouches calibre 38,4 caisses de 1,000 unités de cartouches 9 mm, 10 caisses de 250 unités de cartouches calibre 12,7 étuis, 50 boîtes de 50 cartouches 380, 2 boîtes 250 cartouches 12,7 chargeurs calibre 5,56 mm, 1 chargeur M14, 12 uniformes (pantalon bleu, chemise noire), 5 gilets tactiques, 1 pistolet Glock 9 mm BCB2761 et un chargeur étaient parmi les objets trouvés. C’est certain que ces armes n’étaient pas retournées à leur lieu d’origine, à Miami. Qu’avait-on fait de ces armes de guerre ? Sont-elles utilisées par la Police Nationale ?

Le travail des responsables de douanes de concert à la Police et la Justice doit être encouragé et renforcé par les autorités de l’État afin de suspendre l’importation illégale des armes et munitions dans les douanes haïtiennes. Néanmoins, il s’avère important que les autorités concernées prennent des dispositions pour bien gérer les armes et munitions saisies pourque ces actions n’apparaissent comme un fiasco.

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