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Éditorial | Haïti dans le gouffre, les artistes s’en foutent !

(TripFoumi Enfo) – Comme auraient pu dire certaines personnes, la situation chaotique que connaît le pays depuis des lustres se poursuit et se détériore de plus en plus. Depuis l’arrivée du régime Tèt Kale dans la plus haute sphère de l’État en 2011, avec l’élection de Michel Joseph Martelly, Haïti se trouve dans son plus bas niveau et ce, dans quasiment tous les domaines. De 2011 à nos jours, on n’observe jamais une trêve dans la descente aux enfers. L’insécurité, la cherté de la vie, la prolifération des gangs armés, les massacres criminels sont, entre autres, les thèmes quotidiennement évoqués dans la presse quand elle dresse le portrait de la situation d’Haïti.

En regardant ces problèmes, plusieurs secteurs vitaux du pays ont élevé la voix dans le but de crier au scandale. Pourtant, quant aux artistes, c’est l’insouciance quasi-totale. Si pour les deux précédentes administrations, à savoir Michel Martelly et Jovenel Moïse, on a pu clairement constater l’adhésion de certains artistes à la chose publique, mais sous l’administration d’Ariel Henry, c’est un peu différent, ce qui est palpable, la passivité de ce secteur est beaucoup plus grande quoique les conditions générales dans lesquelles on évolue dans le pays s’enveniment.

Supporté par la communauté internationale, le Neurochirurgien, Ariel Henry, a pris officiellement les commandes du pays en juillet 2021 pour succéder à Claude Joseph, Premier ministre ad intérim. Arrivé au pouvoir, l’ancien titulaire du Ministère des Affaires Sociales et du Travail sous l’administration de Michel Joseph Martelly a vite trouvé le soutien d’une frange de l’opposition politique. Les véritables figures des grands mouvements de protestation sous la présidence de Jovenel Moïse s’alignent dans le dos du Premier ministre pour défendre leurs propres intérêts au grand dam de la République. En conséquence, Ariel Henry se trouve à l’aise comme un poisson dans l’eau dans sa fonction. Malgré les tares qui rongent la société haïtienne quotidiennement, le docteur Ariel Henry s’est lui-même anesthésié afin de ne ressentir aucun impact, aucune douleur.

Plusieurs secteurs d’activité sont menacés, même les loisirs sont “séquestrés” par les bandits… la situation est plus qu’alarmante, mais les artistes, eux, s’en foutent !

Ces derniers jours, on constate des mouvements de protestation dans plusieurs villes du pays contre la crise généralisée qui gangrène le pays. Le soutien des artistes à ces mouvements leur donnerait un plus grand éclat comme cela se fait dans d’autres pays dans le monde. Mais il n’en reste rien.

Pendant ce temps, certains groupes musicaux comme Nu Look, Zenglen, Disip ont été en tournée dans le pays. D’autres formations musicales et artistes continuent de se produire dans des soirées et concerts à l’étranger. Ce secteur très convoité ne jette aucun regard sur la misère de la population. Actuellement, dans le pays, la criminalité a atteint son paroxysme, la cherté de la vie se fait sentir dans un niveau inédit, la rareté du carburant devient quasiment endémique… Tous les secteurs devraient apporter leurs contributions en vue d’un souffle nouveau, pourtant, dans le milieu musical, c’est la poursuite de certaines mauvaises pratiques. Certains qui se disent présentateurs d’émissions dans les médias traditionnels et sur les réseaux sociaux s’introduisent sans retenu dans les pratiques blasphématoires et diffamatoires. C’est la débandade générale dans ce secteur.

Des artistes populaires et expérimentés sont à couteaux tirés. Ils créent autour d’eux une atmosphère malsaine. Certains d’entre eux sont soupçonnés d’être de connivence avec des bandits, on peut citer par exemple le rappeur Fantom, qui a proféré des menaces de mort contre l’animateur Carel Pedre. Quant au chanteur et sénateur Garcia Delva, son nom est cité dans plusieurs rapports d’organisations des droits humains pour des pratiques louches en complicité avec des civils armés. On peut également mentionner le nom des artistes comme Arly Larivière et Tony Mix qui se sont produits en spectacle dans des quartiers populaires au profit des gangs armés.

Au lieu d’alimenter ces conduites nuisibles, ou encore de se fermer les yeux sur les véritables problèmes qui entravent le bon fonctionnement du pays, ces gens là, qui font partie du milieu culturel, pourraient participer dans des actions en vue d’un renouveau.

À Porto Rico, par exemple, le gouverneur Ricardo Rossello a été contraint d’annoncer sa démission en juillet 2019 suite à l’intervention de plusieurs artistes de cette île dans des mouvements populaires contre lui. La plus haute autorité politique de cet État associé aux États-Unis était seulement accusée d’avoir ténu des propos racistes, sexistes et homophobes sur la messagerie cryptée Telegram. Les Portoricains ont occupé les rues pendant plus d’une semaine réclamant le départ de Ricardo Rossello. De nombreux artistes se sont joints au mouvement, et ils ont abouti au résultat escompté. Alors qu’en Haïti on vit le pire et, l’apport des artistes est toujours tiré par les cheveux.

Dans ce mouvement au Porto Rico, des artistes ténors comme Ricky Martin, Residente, Daddy Yankee ont joué un rôle très important. Leur présence a été tellement significative dans la mobilisation citoyenne que le gouverneur ne pouvait pas faire autrement que de tirer la révérence. De nombreuses célébrités de l’île ont dénoncé les propos de Ricardo Rossello. L’acteur Benicio Del Toro, le duo de “Despacito”, Daddy Yankee et Louis Fonsi, ou encore le rappeur Bad Brunny, qui avait même décidé d’interrompre sa tournée en Europe pour participer aux rassemblements. Pourtant, dans le cas de notre pays, les artistes restent toujours dans leur confort, et prêts à oublier toute une population pour des miettes.

Haïti doit renaître de ses cendres avec la participation de toutes les strates de la population. De par leur popularité, les artistes peuvent se constituer comme de véritables lanceurs d’alerte. La situation dans laquelle le pays se trouve est critique, si tous les secteurs d’activités n’apportent pas leurs contributions pour un changement radical, on risque un éclatement général. Rien ne fonctionne, c’est précisément le moment idéal pour les artistes de finir avec leur chimère “Kite Peyi m Mache”.

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