Agriculture

Robion et Mayard, deux facettes de l’agriculture haïtienne

(TripFoumi Enfo) – Robion et Mayard sont deux petites localités de Saint-Marc. La première se trouve au sommet d’une montagne de la chaîne des Matheux dans la troisième section communale. La seconde se loge dans les hauteurs de Bois-Neuf de la première section communale.

En dépit de son relief accidenté, Haïti est considéré à tort ou à raison comme un pays essentiellement agricole. Ce constat traduirait que l’agriculture occupe une place primordiale au sein de la population et représente le socle de l’économie nationale, même si la tendance actuelle tend à changer ces dernières années.

L’Artibonite, grenier d’Haïti, possède de vastes terres fertiles. Cela ne veut pas dire pour autant que toutes ces ressources sont exploitées à leur juste valeur. Opportunités et manques se côtoient à l’intérieur de ce département, livrant un tableau mitigé de la production agricole. L’analyse minutieuse de la conjoncture sévissant tant à Mayard qu’à Robion permettra de lever le voile sur la réalité qui prévaut dans ces deux milieux ruraux.

En Haïti, le milieu rural est traité en parent pauvre. C’est pourtant cette structure qui alimente les villes en denrées et produits alimentaires et autres matières premières. Il est urgent et important de porter de nouveaux regards sur le seul et unique rempart du pays contre les importations relatives à l’alimentation.

Doté du climat caractéristique d’Haïti, Mayard se dresse sur une colline aux pentes raides que les habitants gravissent à toute heure de la journée pour vaquer à leurs occupations. Des taxi-motos assurent le transport au sein de la communauté. Dépourvue d’infrastructures, les gens de la localité s’adaptent en s’inventant des moyens d’assurer leur survie. L’agriculture domine. Tout le monde est exploitant, même s’il évolue dans d’autres secteurs.

Le plus souvent, la production végétale se heurte à la problématique de l’eau. Mayard en est épargné. Deux grandes sources issues des hauteurs des montagnes desservent la région. Il s’agit de “Tèt Sous” et de “Twou Laza”. Grâce à l’appui de certaines organisations, l’eau est distribuée dans des canaux d’irrigation en béton qui traversent de part et d’autre la zone. En des points spéciaux, des fontaines fournissent l’eau pour le service des ménages.

Les exploitants établissent un calendrier d’arrosage. Tout au long de la journée et même de la nuit, ils captent l’eau qu’ils détournent par le biais de canaux secondaires menant aux exploitations. Étant disponible, l’eau favorise le développement de la production. Ainsi, des champs bien verts se dessinent de chaque côté des sentiers. L’élevage y est pratiquée à échelle réduite. Les choix se portent en général sur les volailles, les bovins et surtout les caprins.

La culture de la banane et celle de la papaye dominent. Par contre, l’on cultive le manioc, le haricot, la tomate, le poivron en association avec les cultures dominantes. L’on retrouve “l’arbre véritable” communément appelé “polo” qui est très utilisé dans la consommation locale.

Les infrastructures routières freinent la commercialisation des produits en Haïti. C’est au marché de Pierre Payen que les natifs de Mayard écoulent leurs récoltes. Ce marché fonctionne tous les jours. Il draine une foule immense.

La construction de voies de communication est essentielle au commerce dans un pays. Mais elle nécessite des travaux difficiles et coûteux surtout dans les montagnes. Ce qui explique pourquoi Haïti n’a pas suffisamment des voies de pénétration.

Situé au sud du département de l’Artibonite, Robion de la région de Goyavier est perdu aux sommets de la chaîne des Matheux. Il jouit d’un microclimat. Dès le premier contact, les brises jettent un vent froid. L’atmosphère demeure glaciale même quand le soleil brille de ses mille feux. Du haut, l’on observe d’une vue immense la vallée de l’Artibonite qui s’étale verdoyante. D’un autre côté, le littoral s’étend avec majestuosité.

Robion est difficile d’accès. Des sentiers sinueux dans la montagne y conduisent. Des motocyclistes pratiquent le trajet entre cette localité et Saint-Marc. Le sol argileux, bon à la poterie, présent également à Mont-Organisé dans le Nord-Est, n’est pas exploité.

L’eau manque cruellement dans cette région. Les habitants sont obligés de parcourir de longues distances dans l’espoir de trouver le liquide vital.

La culture maraîchère prédomine. L’organisation ITECA (Institut de Technologie et d’Animation) a implanté une unité de transformation et accompagne les exploitants par des formations et des dons de semence.

Il est difficile pour ces exploitants de descendre avec leurs produits au centre-ville de Saint-Marc. Les bénéfices qu’ils auraient perçu sont consommés dans le transport qui coûte mille gourdes par sac de denrées.

Ils vivent avec l’espoir incertain de voir surgir des infrastructures routières viables pour desservir leur communauté, de disposer de l’eau à volonté, de vivre paisiblement dans leurs contrées sans nul besoin d’aller gonfler les villes ou d’aller tenter leur chance sous un autre ciel.

A Robion, tout comme à Mayard, les jeunes ne voient plus en l’agriculture une alternative. Certains partent en ville. D’autres se font chauffeurs de taxi ou migrent dans d’autres pays. La main-d’œuvre prend alors un sérieux coup. L’urgence d’une politique agricole bien pensée se fait sentir. Le constat est sans appel. Il faut commencer maintenant ou payer les conséquences plus tard.

Adblock Detected

Please consider supporting us by disabling your ad blocker