Éditorial

Éditorial | NON à la résignation, OUI à la révolte !

(TripFoumi Enfo) – Trouver un subterfuge pour contourner une situation déjà difficile, intolérable et invivable, est une attitude récurrente dans le quotidien haïtien qui débouche fort souvent sur une résignation stagnante. Ce comportement est l’ennemi du changement et complice de la descente aux enfers de ce pays. En aucun cas, la résignation ne peut être considérée comme la meilleure réaction à la misère et à l’injustice, l’échappatoire doit être la révolte qui recèle la capacité de briser les verrous de la pauvreté et de cette violence planifiée. Cette indifférence face à la détérioration de la situation sur tous les plans en Haïti n’est ni inoccente ni spontanée. Elle est bien la résultante d’une culture de résignation inculquée par les institutions de socialisation du pays et la normalisation de l’injustice et de l’impunité par les appareils de l’État. D’où la nécessité de recourir à la révolte pour bannir ces pratiques provoquant une misère atroce et une insécurité sans pareille dans le pays. De ce fait, un leadership collectif armé d’une idéologie forte doit être émergé pour un changement radical.

La nécessité de recourir à la révolte

La bravoure du peuple haïtien ne peut pas être mise en question par rapport à sa conquête dans l’histoire. La Nation haïtienne est connue pour sa qualité aventurière et guerrière. Pourtant, depuis des années son attitude défensive a cédé la place à une étonnante passivité en tolérant l’inacceptable. Cette situation complexe est, sans doute, le résultat de l’aliénation politique, médiatique, religieuse et la violence des gangs armés dont est victime la population haïtienne. En ce sens, une prise de conscience collective serait le moyen inéluctable pour remédier à cette cruauté.

L’impact des institutions de socialisation sur la passivité de la population

Si l’indifférence est souvent considérée comme une sorte d’insensibilité, dans le cas de la population haïtienne, c’est différent. Elle endure amèrement le poids de l’irresponsabilité des autorités de l’État, de l’insécurité généralisée et de la précarité. Cependant, par rapport à une psychose instrumentalisée par les dirigeants de l’État, la marge naturellement attribuée à la révolte est drastiquement réduite. La crainte de se faire bastonner et/ou même de se faire tuer pour des revendications légitimes s’écrit en des lettres foncées. La protection désespérée de soi prend le dessus sur la défense collective.

Ce comportement résignant face à l’adversité résulte de l’éducation sociale assimilant toute forme de revendication légitime à des actes barbares. C’est bien la conséquence de la non vulgarisation des valeurs patriotiques par les écoles haïtiennes interdisant le désordre pour changer l’ordre injustement établi. En effet, face à la violence symbolique instrumentalisée dans une société, la violence physique demeure la voie de résistance et de l’insoumission. En ce sens, l’instruction gratuite émise par le système éducatif haïtien tend à former des conformistes plutôt que des citoyens aptes à défendre leurs droits garantis par la loi mère du pays (la Constitution) et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.

Les institutions religieuses ont poursuivi le travail d’aliénation mentale en prêchant une individualité céleste fragile au bien-être collectif : le royaume est personnel. De ce fait, le sauvetage individuel devient le credo des adeptes en négligeant la vie de la communauté et leur responsabilité citoyenne dans la cité. Ils se sont considérés comme des êtres en transit sur la terre et par conséquent, les problèmes socio-politiques du pays ne les concernent pas. De ce fait, vu la crise multiforme qui sévit en Haïti, une conscience collective est nécessaire pour le chambardement de ce système prédateur et stérile. Pour ce faire, la théologie de “résignation” prêchée par les églises doit fait place à une théologie de “libération”. Ainsi, nous parvenons à une masse critique suffisante pour le changement tant souhaité qui doit passer indubitablement par une révolte populaire.

Par ailleurs, l’empreinte des médias de masse ne doit pas être ignorée sur la passivité de la population haïtienne. Au lieu d’informer et d’analyser en passant au crible les flux d’informations pour une compréhension mieux partagée des situations, les agences de presse préfèrent se mettre au service de leurs patrons en manipulant les données et du coup créer des opinions fallacieuses. Pour cette raison, au même titre que les écoles et les églises, la Presse est un instrument d’aliénation servant à garder le peuple dans la crasse.

Combattre l’injustice sous toutes ses formes

Oui la révolte peut ! Et par rapport à l’aggravation de la crise multidimensionnelle en Haïti, seule la révolte peut. Le peuple haïtien a cette capacité à changer ce qui paraît immuable. Nos ancêtres avaient défié l’ordre colonial pour arracher leur “Liberté”, en 1804. Aujourd’hui, nos ennemis ne sont pas seulement des colons mais également des frères dénaturés qui priorisent leurs intérêts mesquins au détriment de la Nation. Comme il fut, il sera. La révolte fut et demeurera le moyen le plus efficace pour s’en sortir. On doit commencer par l’éradication de l’injustice, la corruption et la violence avec la dernière rigueur.

La crise haïtienne qui est une crise systémique, s’enracine dans tous les compartiments de l’État et les rouages de la société. Ce qui rend difficile le changement. Dans ce cas, le peuple haïtien, par le biais de la mobilisation générale et de la violence émancipatrice, peut jouer un rôle de premier plan.

Le besoin d’un leadership collectif

Par rapport à l’ampleur de cette crise en Haïti, personne ne peut, seul, trouver une solution. D’où l’importance d’un leadership collectif capable de mener des mouvements de révolte susceptibles de changer la donne.

En effet, l’implication de la jeunesse sur tous les fronts peut être un atout pour déloger la classe politique dépassée, désuète, qui a ruiné le pays dans cet état de délabrement.

Enfin, Mettre un point d’arrêt à la résignation et exiger de meilleures conditions de vie doivent être le leitmotiv de la population haïtienne qui est trop longtemps victime à cause de sa passivité. Il n’est pas question de s’adapter à des situations invivables et humainement inacceptables. Lorsque nos droits à la vie, la santé, l’éducation, la sécurité, la justice, la liberté d’expression, entre autres, sont violés avec une telle flagrance, le recours à la révolte demeure indispensable. Finissons en ces termes : “Quand le mal est aussi ardemment défendu, le bien doit devenir violent”.

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