Éditorial

Éditorial | Vers un retour complet du choléra en Haïti

(TripFoumi Enfo) – L’insécurité galopante qui prévaut dans le pays depuis plusieurs années vient d’atteindre son apogée ces derniers mois, sous l’administration dirigée par Ariel Henry. La prolifération des gangs armés, les cas d’assassinat, de vol et de viol font la Une des journaux quotidiennement. Incapable de résoudre ce fléau qui sape le fonctionnement du pays, le gouvernement a pris une résolution à l’unanimité en septembre dernier demandant au conseil de sécurité de l’ONU d’envoyer une force militaire étrangère sur le territoire national. Au moment où l’on constate la recrudescence du choléra dans le pays, une maladie introduite sur notre territoire par une force armée onusienne en 2010, cette nouvelle mesure du gouvernement haïtien ouvre la voie pour un retour complet de la maladie en Haïti. Sachant que depuis plusieurs semaines, les autorités sanitaires ont annoncé la résurgence de l’épidémie.

Suite à la demande officielle du gouvernement haïtien à l’Organisation des Nations Unies, le gouvernement américain entame des processus pouvant faciliter l’arrivée d’une intervention militaire sur le territoire national, mission qu’ils ne veulent pas eux-mêmes diriger d’ailleurs. La réticence des pays comme la Chine et la Russie a quasiment bloqué les procédures pouvant aboutir au retour d’une force onusienne en Haïti. Au mépris de ce ralentissement, les États-Unis font tout un pèlerinage auprès de certains pays comme le Canada en vue de trouver un pays pour prendre les rênes des troupes armées étrangères sur la terre de Dessalines. Suivant ce constat, on est sur la voie de connaître une énième intervention militaire dans le pays, ce qui serait au grand dam de la nation sachant que les forces étrangères ont toujours envenimé la situation dégradante du pays en augmentant les cas de viol, de vols et maladie chronique comme cela a été le cas en 2010 avec le choléra, maladie introduite sur le sol haïtien par les soldats de l’ONU.

Les conséquences de la présence des forces armées étrangères en Haïti

Au début du siècle dernier, alors qu’une crise aiguë ébranlait le pays sous l’impulsion de certaines forces sociales cherchant à atteindre un nouvel équilibre, l’action de puissants facteurs externes a modifié ce processus. Les États-Unis entrèrent alors dans une aire accélérée de leur développement capitaliste dont l’étape impérialiste était le point culminant ; ils avaient comme objectif important de leur stratégie d’expansion la domination de l’Amérique Latine. Celle-ci a revêtu plusieurs formes, depuis la subtile diplomatie du dollar jusqu’à l’intervention militaire, le BIG STICK appliqué surtout dans la zone des Caraïbes.

Dans le cadre de cette politique, les troupes américaines débarquèrent en Haïti en 1915, s’y installant jusqu’en 1934. Cette intervention a constitué un cas concret d’impérialisme, c’est-à-dire que les monopoles engagés dans l’agrandissement de leur sphère d’autorité ont exercé leur pouvoir hégémonique. Les résultats de cette domination américaine sont néfastes pour le pays. On en paie le prix jusqu’à présent.

Les missions étrangères n’ont jamais résolu les graves problèmes auxquels la nation haïtienne est en proie. De préférence, elles ont affaibli nos institutions, alimenté l’oligarchie existante et sont quasiment nuisibles au développement économique et politique du pays.

L’arrivée des Forces militaires américaines en Haïti en 1994 ont favorisé la disparition des Forces Armées d’Haïti (FAd’H), avec la complicité de l’ex-président Jean Bertrand Aristide pour faire place à la Police Nationale d’Haïti contrôlée par les États-Unis et le Canada. Mal équipée, impuissante, mauvaise formation et politisée, cette Force de l’ordre n’arrive jamais à limiter, ou encore à éradiquer l’émergence des gangs armés dans le pays.

Ce qui est tellement vrai, en 2004, suite au départ du pouvoir de Jean Bertrand Aristide, alors que le pays faisait face à de graves troubles politiques favorisant le fonctionnement en toute liberté de nombreux groupes armés, le gouvernement d’alors, dirigé par Gérard Latortue et Boniface Alexandre, a soutenu tacitement un appel à la protection lancé par ce dernier dans un discours le 26 février 2004. L’ONU va créer la MINUSTAH par l’adoption de deux résolutions adoptées par le Conseil de Sécurité. Cette intervention a non seulement laissé des traces mais les gangs armés sont devenus beaucoup plus puissants en Haïti juste après leur départ.

Cette mission qui était venue pour stabiliser le pays n’a pas été du tout réactive suite au passage du séisme dévastateur survenu le 12 janvier 2010. Elle a également eu un rôle de police problématique au cours des protestations populaires durant toute la durée de son intervention dans le pays.

En outre, les soldats de l’ONU ont été impliqués dans des cas de viol et ce, sur des personnes de sexe masculin et féminin, mais aussi sur des mineurs. Cette Force onusienne a également importé le choléra dans le pays, maladie causant plusieurs milliers de morts chez nos compatriotes. Après plusieurs années, l’ONU a reconnu sa responsabilité relative à l’arrivée de la maladie en Haïti mais en ce qui concerne le dédommagement de la population, cette question n’a jamais été évoquée jusqu’à la recrudescence de l’épidémie, une nouvelle fois dans le pays.

Les solutions envisageables

Les dirigeants politiques haïtiens doivent assumer leur responsabilité dans la gestion des affaires politiques du pays. Ils doivent travailler afin de rendre fortes les institutions publiques. Cela faciliterait la stabilité politique et éviterait que des hommes politiques, des hommes d’affaires, et certains membres de la classe moyenne alimentent les gangs armés, qui constituent depuis plusieurs années une véritable entrave au bon fonctionnement du pays.

En ce qui concerne les puissances étrangères, les soit-disant pays amis d’Haïti, il faut qu’elles arrêtent de s’immiscer dans les décisions politiques et administratives du pays. Ces derniers doivent offrir aux autorités haïtiennes de vrais supports permettant l’anéantissement des gangs armés en encadrant les Forces de police avec des formations soutenues et des équipements fiables.

Et pour finir, comme ils essayent de faire maladroitement ces jours-ci, ils doivent prendre des mesures contre tous les hommes politiques ainsi que ceux du secteur des affaires qui créent et commanditent les groupes armés en Haïti.

Haïti n’est pas un pays conquis. Nous sommes libres de faire nos choix et nos erreurs, et de grandir à partir de là. Cessez de comploter contre nous, contre nos valeurs. Vous avez tout fait pour nous faire rater le train du développement et aujourd’hui encore, vous persévérez dans votre obsession diabolique à notre égard, celle de nous détruire par l’implosion de notre société. N’avons-nous pas assez souffert, devons-nous encore payer l’héroïsme de nos ancêtres ?

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