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«PAWÒL POU OU» : le lectorat de TripFoumi Enfo commente la rentrée scolaire 2024-2025

Comme annoncé, le mardi 1er octobre, le gouvernement a donné le coup d’envoi officiel de l’année scolaire 2024-2025. Antoine Augustin, ministre de l’Éducation nationale, a participé à une cérémonie officielle organisée dans le sud du pays à cet effet. Dans plusieurs villes de province, comme à Jérémie, des milliers d’enfants se sont rendus en salle de cours. Mais si certaines écoles ont pu rouvrir leurs portes pour recevoir les écoliers dès la première semaine, d’autres non. Car à plusieurs endroits du pays, des écoles rencontrent beaucoup de difficultés.

Langaj

Autour de la possibilité de voir fonctionner les établissements partout sur le territoire national au courant du mois d’octobre, TripFoumi Enfo a interagi avec son lectorat durant la semaine d’ouverture. Certains internautes ont décrit un contexte difficile pour cette reprise des activités scolaires.

Contexte de la réouverture des classes : retour sur l’année scolaire précédente

Durant l’année scolaire précédente, la situation a été très difficile pour certains établissements scolaires, notamment dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, tenant compte de la dégradation des conditions sécuritaires. Les attaques répétées des gangs criminels à Carrefour-Feuilles, Bon Repos, Cabaret, entre autres, ont poussé certains à fermer leurs portes et d’autres à servir comme abris pour les gens fuyant le déferlement des criminels armés.

Il faut dire que le 29 février dernier, la situation allait se dégrader davantage lorsque les gangs criminels se sont fédérés pour engloutir Port-au-Prince à travers un niveau de violence sans précédent. La situation s’est empirée pour les écoles, car certaines ont été soit attaquées, pillées ou incendiées par les malfrats. Depuis, la situation ne s’est pas vraiment améliorée. Les gangs ont même attaqué certaines zones précédemment épargnées par la grande violence. Les communes de Gressier et de Ganthier constituent un exemple.

Maintenant à Port-au-Prince, plus de 600.000 personnes sont déplacées à cause du niveau incalculable de violence, selon des chiffres révélés par l’ONU. Près de la moitié de la population haïtienne souffre d’une faim aiguë, toujours selon l’organisation mondiale.

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C’est dans ce contexte aussi particulier que le gouvernement a lancé l’année académique 2024-2025. Une situation qui a suscité de nombreuses critiques à l’égard des autorités. Des critiques, non pas parce que l’année scolaire est relancée, mais parce que rien n’a été fait pour améliorer la situation, ce qui aurait un peu rassuré certaines des parties prenantes.

Guy*, un de nos lecteurs, s’est montré ultra pessimiste face au fonctionnement des établissements scolaires sur le territoire. «Aujourd’hui, plus de 80 % de la capitale est contrôlée par des bandits armés, des écoles servant d’abris pour des milliers de déplacés. Je ne crois pas que les établissements pourront rouvrir leurs portes partout dans le pays», a-t-il analysé.

Il a ajouté que «malheureusement en Haïti, l’école est comme un outil politique pour les autorités. C’est comme une façade. Dès que l’école fonctionne, c’est comme si tout allait bien pour elles. Ça leur permet de cacher la situation catastrophique que vit la population. C’est pourquoi elles se sont empressées de lancer l’année scolaire, malgré ce niveau d’insécurité».

Pour Marie-Ange*, les écoles ne pourront pas fonctionner partout car «depuis quelque temps, c’était déjà le cas à plusieurs endroits du pays et ça n’avait jamais affecté le ministère de l’Éducation nationale».

Si certains pensent qu’il sera difficile pour des écoles sur le territoire de rouvrir leurs portes, Wylmar*, quant à lui, s’est demandé pourquoi pas. «Même dans des pays ravagés par la guerre, les écoles continuent de fonctionner. Alors, pourquoi pas en Haïti», s’est-il interrogé ?

Une année scolaire lancée avec négligence !

Tenant compte de la manière dont l’année scolaire précédente a été bouclée, il est logique de penser que la nouvelle a été lancée sans préparation. L’insécurité, préoccupation élémentaire des citoyens, n’a pas été abordée comme l’avaient promis les autorités.

Comme preuve, pour boucler l’année précédente, face à l’aggravation de la situation sécuritaire, des mesures de précaution avaient été adoptées par les autorités de l’Éducation nationale lors des examens du baccalauréat. Dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, les communes de la Croix-des-Bouquets, de Cité Soleil, une partie de Port-au-Prince et de Tabarre, entre autres, n’avaient reçu aucun centre d’examens. C’était le cas pour plusieurs communes de l’Artibonite également. Mais depuis cette période, qu’est-ce qui a été fait pour améliorer la situation ?

Autre négligence du gouvernement, on peut constater que c’est une année scolaire lancée sur front de grève de professeurs des établissements publics. Dans le sud du pays, au micro de TripFoumi Enfo, certains ont exprimé leur désaccord face à la réouverture des classes, soulignant qu’ils n’ont pas reçu d’émoluments depuis près de cinq ans.

L’année scolaire a été lancée, c’est une bonne chose pour le pays. Selon les prévisions du ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle (MENFP), au niveau fondamental, les élèves devront suivre 940 heures de cours et 1.118 au niveau du secondaire, soit 188 jours de classe contre 11 jours de congé.

Tenant compte de la situation du pays et de l’incapacité des autorités à le pacifier, il est improbable que ces prévisions soient respectées, car durant les années antérieures, ça n’a jamais été le cas. Toutefois, espérons que nos écoliers pourront quand-même acquérir un nombre maximal de cours, leur permettant de se rapprocher du standard international en termes de temps d’enseignement.

*Tous les noms utilisés dans le texte sont des noms d’emprunt, question de protéger la vie privée des personnes ayant réagi.

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