Le CPT, un coup de marteau de plus sur le clou de la crise haïtienne ?
S’enfonçant de plus en plus dans la misère et l’instabilité, Haïti tâtonne dans le mille pour trouver une solution comme par miracle. Après la démission forcée du Premier ministre Ariel Henry, un Conseil présidentiel transitoire (CPT) de 9 membres a vu le jour. Le Conseil, après avoir tant tergiversé, a finalment jeté son dévolu sur Garry Conille comme le nouveau chef de la Primature. Ce nouvel exécutif bicéphale a pour mission, entre autres, de résoudre le problème de l’insécurité, d’organiser les élections, à en croire les acteurs impliqués. Mais, plus de cinq mois après, le CPT, déjà en crise, paraît incapable de faire fonctionner la machine.
Formé depuis le 12 avril 2024, le CPT ne trouverait toutefois pas encore la formule adéquate pour permettre au pays de rompre avec une gouvernance reposée sur la violence et la corruption, sapant les bases de son développement. D’ailleurs, trois de ces neuf membres sont cités dans un scandale de corruption. Il s’agit de Louis Gérald Gilles, Smith Augustin et Emmanuel Vertilaire. En mai dernier, à eux trois, ils ont réclamé 100 millions de gourdes à Raoul Pascal Pierre-Louis, directeur de la Banque nationale de crédit (BNC), dont le mandat était arrivé à terme. Cette somme, exigée par les tois hommes, visait à maintenir M. Pierre-Louis à la tête de la BNC, ce qui n’a pas été fait.
Révoqué par le gouvernement, Pierre-Louis a décidé de dénoncer ces trois membres du conseil par le biais d’une lettre envoyée à la Primature en juillet dernier. Se saisissant du dossier, l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) a publié son rapport d’enquête, révélant effectivement un véritable scandale de corruption. L’ULCC demande donc de mettre l’action publique en mouvement contre les trois conseillers. Ces derniers, au lieu de remettre le tablier, préfèrent renoncer à la présidence tournante, une résolution votée par les autres, à l’exception d’Edgard Leblanc Fils, aidant.
Ce dernier, qui s’attendait à la démission de ses trois paires, s’est adressé au pays. Dans son adresse à la nation, diffusée sur la Télévision nationale d’Haïti (TNH), il a exprimé son regret par rapport à la voie sur laquelle s’est dirigé le CPT dont il est désormais l’ex-président, Leslie Voltaire lui succédant. Le représentant de l’Accord du 21 décembre n’a pas caché sa frustration quant à ce cas de corruption. Démissionnera-t-il du CPT dans les jours à venir ? Force est d’attendre.
Entre-temps, entre le Premier ministre Garry Conille et le CPT, les violons semblent ne pas s’accorder. Une présidence et une Primature qui jouent à celle qui pisse le plus loin, à quoi peut-on s’attendre ? En tout cas, dans cette bataille pour le pouvoir, des bandits armés continuent de semer le deuil dans les familles haïtiennes. Environ 70 personnes ont été assassinées à Pont-Sondé par le gang «Grand grif» jeudi 3 octobre, selon un rapport de l’ONU.