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«PAWÒL POU OU» : le lectorat de TripFoumi Enfo commente l’arrogance des gangs armés en Haïti

En Haïti, l’absence de leadership clair et la division croissante entre le gouvernement et le Conseil présidentiel de transition (CPT) créent un vide béant que les gangs armés exploitent avec une arrogance déconcertante. Alors que les tensions politiques s’intensifient et que les institutions vacillent, ces groupes criminels ne se contentent pas d’imposer leur loi ; ils se présentent comme des acteurs incontournables de la vie quotidienne. Dans ce contexte d’insécurité omniprésente, les lecteurs de TripFoumi Enfo expriment une profonde frustration face à une situation où l’État semble dépassé, où la justice est un concept en péril et où la confiance dans les dirigeants est en chute libre. Les commentaires révèlent une société trahie, piégée entre des promesses non tenues et une réalité où les gangs intensifient leur emprise sur les communautés.

Langaj

Une crise sécuritaire aggravée

Six mois après l’arrivée au pouvoir du CPT et quatre mois après la prise de fonction du gouvernement de Garry Conille, la crise sécuritaire s’est considérablement aggravée, et ce malgré la présence d’une force multinationale. Les promesses des autorités de limiter les actions criminelles n’ont pas abouti, et de nouvelles zones rejoignent la liste des territoires contrôlés par des bandes criminelles. Le massacre de Pont Sondé, le 3 octobre dernier, ayant causé plus d’une centaine de morts, illustre cette tragédie. Les forces de sécurité haïtiennes, mal équipées et sous-formées, demeurent sur la défensive. Un internaute remarque : «Il n’y a pas de renseignement, aucune stratégie pour attaquer les gangs dans leurs fiefs». Cette inaction, exacerbée par l’absence de matériel sophistiqué tel que des drones ou des hélicoptères, permet aux gangs de se sentir renforcés par l’inefficacité des forces de l’ordre.

L’État, un partenaire silencieux

De nombreux lecteurs estiment que l’État, le secteur privé et même la communauté internationale semblent en accord tacite avec les gangs. Un commentaire souligne que «les gangs sont confortables parce que l’État, le secteur privé et la communauté internationale n’ont aucun problème avec eux». Cette perception alimente un sentiment de trahison et de désespoir, laissant croire que la lutte contre l’insécurité est compromise par des intérêts cachés. En novembre 2022, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté un régime de sanctions ciblées visant ceux qui menacent la paix en Haïti, y compris des politiciens et des barons du secteur privé. Pourtant, ces mesures n’ont pas permis d’améliorer la situation.

La défaillance du système judiciaire

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La défaillance du système judiciaire est une autre préoccupation majeure. Les lecteurs évoquent souvent l’inefficacité des institutions. Une commentatrice déclare : «Si la justice d’un pays fonctionne très mal, cela peut avoir des conséquences néfastes sur cette société». Les pourvoyeurs des gangs se sentent à l’abri, car il n’y a aucune instance osant les interroger. Ce sentiment d’impunité permet aux gangs d’agir sans crainte de répercussions, exacerbant la violence dans les communautés. Malgré les sanctions annoncées par l’ONU, la justice haïtienne n’a pas manifesté d’intérêt pour enquêter sur les personnes sanctionnées. De plus, depuis 2019, Jean Rebel Dorcenat, membre de la Commission nationale de désarmement, démantèlement et réinsertion (CNDDR), a déclaré que le marché juteux des munitions en Haïti est contrôlé par onze personnes, dont des officiels, des politiques et des membres du secteur privé. Mais, la justice haïtienne n’avait pris aucune disposition dans cette affaire.

Un gouvernement de transition désormais contesté

Le gouvernement de transition est également sous le feu des critiques. Plusieurs commentaires affirment qu’il est arrivé au pouvoir grâce à un mouvement des gangs et le soutien de la communauté internationale, illustrant une collusion alarmante. Un lecteur affirme : «C’est à la faveur du mouvement des gangs que le CPT et le gouvernement de Garry Conille sont arrivés aux affaires. Pensez-vous qu’ils allaient les éliminer ?» Cette situation renforce l’idée que le gouvernement n’est pas seulement inefficace, mais qu’il pourrait aussi être complice des forces qui sapent l’État de droit.

Complot et obstruction à la justice

Des théories du complot émergent parmi les lecteurs, suggérant que cette crise est orchestrée pour obstruer des procès cruciaux, tels que celui de «Petrocaribe» ou l’assassinat de l’ancien président Jovenel Moïse. Un commentaire poignant rappelle : «Haïti est victime d’un complot. Le dossier Petrocaribe ainsi que l’assassinat de Jovenel Moïse sont des affaires sensibles. Si la stabilité était rétablie et que la justice fonctionnait normalement, ces dossiers pourraient avancer et de nombreuses personnes risqueraient d’aller en prison». Pour ces lecteurs, les gangs sont les outils de ceux qui ne veulent pas que le pays avance. Ces préoccupations révèlent une profonde méfiance envers l’élite politique et sa motivation.

Un appel à l’action collective

Malgré ce tableau sombre, de nombreux lecteurs appellent à une mobilisation collective. «Il est crucial que la population se réveille comme un seul homme contre les bandits, y compris ceux en cravate», déclare une internaute. Cette résilience et ce désir de changement montrent que, malgré la peur, l’espoir d’un avenir meilleur demeure.

Les commentaires des lecteurs de TripFoumi Enfo mettent en lumière une lutte complexe et désespérée contre l’arrogance des gangs armés en Haïti. La perception d’une connivence entre l’État, le secteur privé et les gangs, combinée à l’inefficacité du système judiciaire et à l’inadéquation des forces de sécurité, nourrit une méfiance généralisée. Néanmoins, la volonté d’agir et de revendiquer la justice témoigne d’une résilience collective, essentielle pour imaginer un avenir libéré de la violence et de l’arbitraire.

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