
Le journalisme culturel est une branche du journalisme consacrée à la couverture de l’actualité culturelle et artistique comme le cinéma, les arts visuels, la musique et autres. Ce genre joue un rôle prépondérant dans la société en ce qui concerne son pouvoir à démocratiser la culture et inciter à la réflexion. A travers ses réponses et ses grilles d’analyses sur un métier dont on néglige et ignore ses codes déontologiques dans le pays, Godson Moulite, journaliste depuis des années et contributeur actif au quotidien Le National, nous livre ses impressions et plaide pour un journalisme éclairé où les critères typiques du métier sont présents à partir duquel l’on peut éduquer les gens en société.
TripFoumi Enfo : Le journalisme culturel est devenu de plus en plus un genre très pratiqué dans le pays. Parfois, les qualités déontologiques requises pour ce métier sont oubliées par certains journalistes qui semblent plus enclins à suivre l’argent. Que pensez-vous de cette tendance que l’on pourrait qualifier de malhonnête ?
Godson Moulite : Il est vrai que le journalisme culturel en Haïti a pris un essor considérable ces dernières années, mais malheureusement, certains journalistes oublient les principes de base du métier, comme l’éthique, la véracité, et le respect du sujet. Ce phénomène, que l’on pourrait qualifier de «malhonnête», est un mal qui touche non seulement le journalisme culturel mais le journalisme en général dans le pays. En Haïti, comme ailleurs, l’influence de l’argent et des intérêts personnels peut fausser la perception du journaliste et, par conséquent, la qualité de l’information. Un journaliste culturel doit avant tout être un gardien de la vérité et de l’intégrité. Il doit s’efforcer de transmettre des informations qui enrichissent et éduquent le public, et non de flatter des intérêts ou de se plier à des pressions extérieures.
TFE : Le journalisme culturel joue un rôle central dans la formation de l’opinion publique et la construction des individus en tant que membres actifs d’une société pour le développement durable. En tenant compte de la situation politico-culturelle du pays, comment voyez-vous ce métier comme un tournant potentiel pour changer l’opinion publique et aider à construire un individu dans la société ?
GM : Le journalisme culturel a un rôle primordial à jouer dans la société haïtienne. Il peut être un puissant levier de transformation sociale, car il permet de remettre en question les normes, d’ouvrir les esprits et de stimuler la réflexion collective. En Haïti, où la situation politique et culturelle est complexe, un journalisme culturel éclairé peut éclairer les consciences, créer un dialogue entre les générations et les différentes classes sociales. Le rôle du journaliste culturel est donc de servir de médiateur, d’éducateur et de critique, afin de susciter un changement positif dans la société. En portant un regard critique sur la culture, il nous aide à comprendre notre passé, à interroger notre présent et à envisager un avenir plus juste et plus solidaire. L’opinion publique, lorsqu’elle est bien informée et sensibilisée, devient plus active et plus responsable, ce qui est essentiel pour le développement durable du pays.
TFE : Y-a-t-il des événements culturels qui ont marqué votre carrière ?
GM : Il y a plusieurs événements qui ont marqué ma carrière, mais l’un des plus significatifs a été la couverture de la scène littéraire et poétique haïtienne lors du Festival de poésie de Port-au-Prince. Cet événement m’a permis de rencontrer des poètes et des écrivains locaux, mais aussi de voir l’impact de la poésie et de la littérature sur la société. Il y a aussi eu la publication de plusieurs articles qui ont alimenté le débat sur la place de la culture dans la société haïtienne, et qui ont suscité des réactions intéressantes parmi mes lecteurs. Chaque événement culturel où j’ai pu apporter ma voix a été une occasion d’enrichir ma compréhension du rôle du journalisme culturel dans la transformation sociale.
TFE : Selon vous, quels sont les caractères d’un bon journaliste culturel ?
GM : Un bon journaliste culturel doit avant tout être curieux et passionné par la culture sous toutes ses formes. Il doit être un excellent observateur, capable de saisir les nuances d’un événement ou d’une œuvre. L’éthique, bien sûr, est primordiale. Il doit toujours respecter la vérité, en évitant les biais et les préjugés, et offrir une analyse juste et éclairée. La capacité à comprendre le contexte historique, politique et social d’une œuvre culturelle est essentielle. Un bon journaliste culturel doit aussi savoir transmettre sa passion pour la culture à son public, en rendant ses articles à la fois accessibles et profonds. Enfin, il doit être indépendant, ne se laissant pas influencer par des pressions extérieures ou des intérêts personnels.
TFE : Avez-vous un message pour les jeunes qui espèrent se lancer dans ce métier en Haïti ?
GM : Aux jeunes qui souhaitent se lancer dans le journalisme culturel, je dirais de ne jamais sous-estimer l’importance de l’intégrité. Ce métier est avant tout un service à la société. Il ne s’agit pas simplement de relater des faits, mais de nourrir la réflexion, d’éduquer et d’inspirer. Restez fidèles à vos valeurs et ne vous laissez pas corrompre par la quête facile du profit. Prenez le temps d’étudier, de vous cultiver, et d’approfondir vos connaissances sur la culture haïtienne et mondiale. Le journalisme culturel est un métier exigeant, mais il est aussi un moyen puissant de contribuer à la construction d’une société plus éclairée et plus consciente. Le chemin est long, mais il est extrêmement gratifiant.
Entretien mené par Kerby Vilma