L’ONU appelle à identifier les responsables des gangs haïtiens

Lors de la Conférence sur la sécurité à Munich, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a souligné, samedi 15 février dernier, l’urgence d’identifier les véritables instigateurs du chaos en Haïti. Il a insisté sur la nécessité de remonter les flux financiers qui alimentent les bandes armées.
« Il est clair qu’il y a des intérêts particuliers dans le maintien de cette situation, et nous devons enquêter et suivre l’argent pour demander des comptes aux responsables », a-t-il déclaré.
Un trafic d’armes hors de contrôle
Selon Türk, la situation en Haïti est une « grande tragédie » nécessitant un soutien international renforcé. Il a rappelé que l’ONU a imposé un embargo sur les armes, mais que les gangs disposent d’un arsenal plus sophistiqué que les forces de l’ordre.
« Haïti ne produit pas d’armes. Elles viennent principalement des États-Unis et transitent aussi par la République dominicaine. Ceux qui profitent du trafic d’armes doivent être arrêtés », a-t-il affirmé.
Les chiffres de l’ONU illustrent l’ampleur de la crise : au moins 5 626 personnes ont été tuées par des gangs en 2024, soit mille de plus que l’année précédente. De plus, 2 213 personnes ont été blessées et 1 494 ont été kidnappées.
Un État en faillite, un exode massif
Le ministre costaricien des Affaires étrangères, Arnoldo André, a qualifié Haïti d’« État en faillite », soulignant que des milliers de citoyens fuient vers l’Amérique centrale sous la pression sociale et sécuritaire.
Il a également pointé du doigt l’impact de la crise sur la République dominicaine, en première ligne face à l’afflux de réfugiés et aux menaces transfrontalières. Malgré les efforts de l’ONU, notamment via le soutien du Kenya et du Salvador, « aucun résultat concret n’a encore été obtenu », a-t-il déclaré, illustrant ainsi l’inefficacité des initiatives internationales.
L’ombre des élites économiques haïtiennes
L’ancienne ministre panaméenne des Affaires étrangères, Erika Mouynes, a évoqué le rôle des élites économiques haïtiennes basées à l’étranger, notamment à Miami et dans certaines régions productrices de pétrole.
« Ils vont et viennent en avion, et derrière tout cela, il y a toujours un business, il y a quelqu’un qui en tire profit », a-t-elle affirmé.
Elle a également souligné que les transferts de fonds de la diaspora haïtienne restent l’une des principales sources de revenus du pays.
Un pays à feu et à sang
Pendant ce temps, sur le terrain, les gangs poursuivent leur escalade de violence. Cette semaine, ils ont incendié l’Hôpital Universitaire d’État d’Haïti, à Port-au-Prince, renforçant leur emprise sur la capitale, dont près de 90 % est sous leur contrôle.
En janvier, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) rapportait que plus d’un million d’Haïtiens sont déplacés, dont plus de la moitié sont des enfants — un chiffre alarmant qui illustre l’ampleur du drame humanitaire.
Des appels à l’action, mais peu de résultats
Face à cette situation, les appels à l’action se multiplient, mais les mesures concrètes restent insuffisantes. Si les Nations unies et certains États affichent leur volonté de lutter contre le crime organisé, la traque des financiers et des complices des gangs reste un défi majeur.
Sans une réelle volonté de s’attaquer aux réseaux qui alimentent cette violence, le chaos en Haïti risque de perdurer, au détriment de millions de citoyens pris en otage par l’insécurité et l’instabilité.