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Quand un Haïtien connaît un certain succès, un autre haïtien est le premier à vouloir sa peau

TripFoumi Enfo) – Le pays dépend bien souvent du cœur de l’homme : il est minuscule si le cœur est petit, et immense si le cœur est grand, dit Simone Schwartz-Bart (1972). En ce sens, la grandeur ou la décadence d’une nation dépend de la mentalité de ses citoyens. Haïti est pauvre parce que la mentalité de l’Haïtien, son cœur est pauvre. Ce pays sera riche, et il fera bon d’y vivre, le jour où les Haïtiens décideront de s’aimer, de s’entraider, de comprendre que le succès de l’un, quel que soit l’endroit où il se trouve, est aussi le succès de tous. Comment se manifeste la pauvreté de la mentalité haïtienne ?

Haiti est ce pays où les gens sont prêts à sauter à la gorge de quiconque essaie de leur voler la vedette. Ainsi, dès qu’un groupe d’artistes, un groupe de journalistes, un groupe de politiciens connaissent un certain succès c’est toujours un autre groupe évoluant dans la même sphère d’activité qui planifie sa chute ou qui n’a cesse qu’ils tombent. Sans comprendre que si ces artistes, ces journalistes, ce politiciens connaissent ce succès c’est tout simplement parce que la chance et l’effort leur ont ouvert meilleur chemin qu’à lui.

L’artiste sort un nouveau tube qui est apprécié par le public, et bien un autre artiste en panne de succès, qui se dit pourtant être son ami, qui le félicite en public, crée des faux profils sur les réseaux sociaux pour le calomnier. Une icône de la presse prend position en faveur du peuple, ce qui augmente son audience, une autre icône, défendant une position contraire, par jalousie invite un ami à son émission et laisse le champ libre à cet ami pour insulter, dénigrer son confrère. Deux politiciens mènent le même combat dans le même parti politique, le premier vilipendera le second le jour où le peuple décidera de placer toute sa confiance en le second. Car la mentalité de l’Haïtien est la suivante : si ce n’est pas moi ce ne sera personne d’autre.

Chaque peuple a son style. Nous les Haïtiens, notre style est pourri. Il n’y a rien de plus désagréable pour un Haïtien pauvre que de voir un autre haïtien issu de la même classe flirter avec le progrès. Quand son frère est dans une situation de souffrance, l’Haïtien jubile. Quand il est dans la crasse, pour se sentir bien l’autre doit être aussi dans la crasse. S’il réussit à grimper l’échelle sociale, il se sentira bien malgré sa réussite si et seulement si c’est lui qui offre à l’autre, qui peine à se hisser, quelques piastres.

Si vous demandez à Vag Lavi, ce chanteur Rabòday, ce qu’il pense de la mentalité de l’Haïtien, il vous répondra les larmes aux yeux : l’Haïtien n’a aucun problème pour aller dans une banque, prendre ligne quelle que soit sa longueur, passer à la caisse pour faire un retrait de 20 000 gourdes sur son compte rien que pour comploter contre vous, mais il ne vous tirera pas d’embarras pour 1000 gourdes. Parce que vous barrer la route est plus important que vous aider. Vous barrer la route est son leitmotiv, sa raison de vivre.

Durant l’occultation américaine Charlemagne Péralte a mené une lutte sans rémission contre les Américains. Cet homme vaillant a passé tout son temps à dire non à l’occupant, au nom de tous. En cavale, devinez qui a vendu la mèche ? Jean Baptiste Conzé, un frère haïtien qui menait le même combat. Moïse Jean Charles, lors des dernières élections, a été trahi par ses plus proches collaborateurs. Mais ne vous étonnez pas si ces traîtres reviennent en bon chien gratter à sa porte le jour où le soleil de la politique haïtienne décidera d’inonder sa demeure. Pour singer Syto Cavé (2004), les gens d’ici ne savent que faire semblant, semblant d’être des gens, mais quand tu regardes de près, y a rien là qu’une pile de fatras déguisés, grimace d’humanité, pas plus !

On ne pouvait rien espérer de ces gens hypocrites. Ils ont un pied dans l’homophobie et l’autre dans l’homosexualité. Ils ont un pied dans le protestantisme, le catholicisme, et l’autre dans le vaudou. Ils ont un pied dans l’opposition et l’autre dans le pouvoir. Ils ont un pied dans la vénération et l’autre dans la médisance. Ils ont un pied dans l’amour et l’autre dans la haine. Le premier pied, ce n’est pas que ça soit un pied sincère, c’est plutôt un pied qui permet de jouer à l’hypocrisie, de tromper la société.

Il est temps que l’Haïtien comprenne que le sentiment d’aigreur, l’hypocrisie et la haine ne mènent qu’à la pauvreté, que l’échelle sociale est faite pour qu’on la grimpe non pour empêcher les rudes travailleurs de la grimper. Et que envier un homme qui essaie de la grimper c’est travailler à sa propre perte.

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