(TripFoumi Enfo) – Si la mort est considérée comme la disparition de tous les signes vitaux chez un être vivant (définition biologique), ce n’est pas du tout le cas pour un disparu qui reste siégé dans la mémoire collective. Comme si c’était hier, les âmes les plus sensibles se souviennent encore d’une belle et fine créole qu’on avait retrouvée morte, presque toute nue, sur une pile d’immondices, à Delmas 24. On pouvait remarquer des lésions sur ses bras et ses fesses. Deux ans déjà, son nom n’est plus évoqué dans la cité.
Evelyne Sincère, belle, se rendait au Carrefour de l’aéroport pour rencontrer son chéri de cœur rencontré sur Facebook. On est le 29 octobre 2020. Si la jeune fille pensait qu’elle allait retourner chez elle le même jour, tel n’avait pas été le cas. Son petit ami, Obed Joseph, alias Kiki, accompagné de deux de ses amis, avait décidé de séquestrer la petite Evelyne pour pouvoir faire chanter sa famille et lui soutirer de l’argent. Voilà le drame.
Alors que Port-au-Prince dansait au rythme des tambours, car, c’était la fête des guédés, le corps sans vie d’une jeune bachelière s’installait, abandonné, comme banni de la civilisation, sur un monticule de détritus, à Delmas 24. Pleurs ! Quand la nouvelle s’était répandue dans le pays, le néant lui-même ne pouvait pas être plus macabre. Indignation ? un peu partout sur les réseaux sociaux, oui. Des marches en blanc ou en noir étaient lancées pour dire NON. Blagues. Des artistes, fleurs en mains, s’étaient rendus sur les lieux du crime pour dire un dernier “au revoir” à la jeune fille. Après ? La République recommençait à marcher aux pas des kidnappeurs et le silence prenait corps et l’indignation continuait sur les réseaux sociaux. On s’indigne pour son clan, voilà la vérité crue.
Deux ans après, le kidnapping est devenu la plus florissante des entreprises du pays. À longueur de journée, sans aucun répit. Elle fonctionne à plein régime. “Pays lock” ? Cela marche à merveille. Après ce qui était arrivé à Evelyne Sincère, si la société s’était mise debout pour dire NON définitivement, on aurait pu ne jamais connaître cette réalité qui s’est imposée à nous aujourd’hui. On assiste à une sorte d’amnésie collective. De l’assassinat d’Evelyne, on en parle plus.
