Haïti

La voix de l’inconscient collectif des Haïtiens noyée dans une sorte de peur contagieuse

Des policiers se sont rassemblés à Pétion-Ville et pleurent la mort de quatre (4) camarades assassinés par les malfrats de Vitelhomme à Métivier il y a cinq (5) jours, l’un et l’autre ne cessent de scander “Moral mwen a zewo”. Durant cette journée de défilé larmoyante de ces agents à Pétion-Ville et sur cette « moral à zéro », les cannibales de Savien, Artibonite, sans aucune pitié, en ont massacré six (6) autres dont ils dévoreront sûrement la chair, et un septième par les “400 Mawozo” de Tabarre ; tantôt on clame l’assassinat d’un ou de deux autres par-ci et par-là. Quinze (15) policiers assassinés en moins d’un mois, un lourd bilan. Nous constatons malheureusement, avec amertume et désespoir, la transformation de nos protecteurs et serviteurs en gibier inoffensif contre les bandits de chasse et agressifs de la République. L’armée d’Haïti (FAd’H) étant en gestation, si la PNH, seule force armée légale sur le territoire, est si pitoyable aux yeux de la population, qui assure la sécurité des vies et bien des citoyens ?

Pendant que nous cherchons à comprendre notre position dans la crise, Il nous paraît anormal d’exprimer de la pitié pour ceux qui sont payés pour nous protéger et nous servir, mais plus encore, nous avons peur pour nos policiers qui ont peur d’affronter les gangs même pour assurer leur survie voire notre sécurité. Maintenant, en quoi sommes-nous différents sur le plan sécuritaire par rapport aux policiers qui réclament sécurité comme tout le monde à un moment où ils se font massacrer, déloger, humilier, kidnapper, tuer et leurs cadavres laissés aux chiens, ils payent au passage dans des points contrôlés par des gangs armés, comme c’est le cas pour nous autres de la population civile.

Vingt fois répété ! “Je pran kou nen kouri dlo”. Cette fois, ils s’expriment en gagnant les rues pour protester à notre manière de peuple : barricader les rues, revendiquer la sécurité, réclamer justice, dénoncer la chasse lancée contre eux. De tels mouvements qui dérangent certainement l’ennemi au niveau de l’État et du secteur privé, mais sûrement amusent et mettent en confiance l’adversaire. Ils sont en train de vivre une deuxième version du drame du 12 mars 2021 à Village-de-Dieu qui était non seulement un mauvais précédent, mais aussi très mal apprécié par l’institution policière et par les agents. Car, ce jour-là, la bataille psychologique était gagnée au profit d’Izo, sa bande “5 secondes” et tous les caïds du reste du pays. Depuis cette victoire symbolique des gangs, les policiers se font souvent attaquer chez eux, dans leurs quartiers par les gangs et voire même déloger dans leurs bases respectives, dans leurs Sous-Commissariats et Commissariats. Une véritable guerre déclarée dont les policiers ne sont peut-être pas conscients ou qu’ils ne prennent pas au sérieux. Tandis qu’ils comptent quotidiennement des cadavres et des blessés dans leurs rangs.

Assez de balles transpercent le corps et l’orgueil des policiers qui salissent leurs uniformes de honte et de sang. À chaque frappe, un coup d’émotion anime une idée de rébellion ou de révolte qui dure le temps des négociations pour ôter toute idée de solidarité. Et, nous ressentons leurs besoins de savoir s’ils sont vraiment en train d’être manipulés par le haut État-major de la PNH. Perdant repères et confiance, ils nous matraquent dans la foulée pour s’assurer de leur autorité : À vos ordres, mon commandant !

En ce sens, on ne peut rien espérer de positif de ce mouvement lancé par les policiers quand on considère qu’ils disent souvent n’avoir jamais reçu l’ordre de combattre les gangs jusqu’à les rendre dysfonctionnels, de plus, ils déclarent n’avoir pas assez d’effectifs et de matériels… Cependant, quand leurs supérieurs leur ordonnent d’aller affronter les gangs avec le peu qu’ils ont, ils y vont quand même. Quand vient l’échec de l’opération, le haut commandement informe que ce n’était pas planifié, et les collègues policiers frustrés répliquent en affirmant le contraire. Par conséquent, si oui il y a une quelconque planification, à défaut d’effectifs et de matériels, pourquoi acceptent-ils sagement d’être livrés à chaque fois ? Aucune preuve d’intelligence dans tout cela. Disons, quelle formule mathématique fait croire à six (6) policiers dans un Commissariat à Liancourt qu’ils sont en sécurité tout en étant entourés d’un gang de plus de deux cents (200) membres ?

De tout cela, l’État ne manifeste aucun intérêt dans la recherche de solution au problème de l’insécurité auquel le pays est confronté. Les policiers, malgré leur volonté, n’ont pas les moyens d’attaquer et de défendre voire même se défendre. Les gangs, créés et nourris par des anciens élus et des particuliers du secteur privé, deviennent des monstres redoutables qui veulent à tout prix attaquer avant d’être attaqués. Pendant longtemps, nous avons constaté malheureusement : un gang peut démanteler un autre, un gang peut forcer des policiers à abandonner un Commissariat, mais jamais l’inverse. Et la police, si faible, ne peut même les empêcher de s’approvisionner en armes et en munitions. Et nous, dans la population civile, il y a longtemps, notre seule moyen de réagir face à tout cela, n’est autre que de s’enfuir. Nous n’avons plus de mots pour nous exprimer, nous perdons espoir, nous n’avons pas foi en un lendemain meilleur dans cette manœuvre pour nous exterminer. 10 ans déjà, depuis notre seul recours pour échapper à la mort est de franchir les frontières d’autres pays, prendre la mer, remplir les cours des bureaux de l’immigration et des ambassades.

Un passeport_une nouvelle dynamique économique_Une quête de survie_Voilà.

28/01/2023
Methelus Mondy
Journaliste

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